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Compte-rendu synthétique par Marc HoussayeCafé Citoyen de Caen (27/10/2001)

Animateur du débat : Marc Houssaye

» Éducation

Comment apprendre à lire et à entendre l'information ?

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Aujourd’hui, la dimension médiatique de notre quotidien s’est considérablement intensifiée. A tel point que l’on identifie désormais les médias à un quatrième pouvoir . Nous vivons, on le dit souvent, dans une « ère de communication ». L’information, « omniprésente et multiforme » dit-on, parcourt, remplit voire sature notre environnement. D’autant qu’elle s’enveloppe de nuances, selon le type de traitement médiatique. D’où cette légitime question : comment apprendre à saisir, à examiner, et à contrôler l’information ?

On mentionna dans un premier temps la pluralité des lignes éditoriales. Chaque journal, chaque radio, chaque chaîne de télévision possède sa propre lecture des événements. Les faits sont rapportés, mais aussi utilisés, orientés. « On peut faire dire tout et n’importe quoi à des faits », souligne un citoyen. Quelqu’un prend pour exemple l’image des anti-mondialistes considérés tantôt comme des militants tantôt comme d’éventuels terroristes. Chaque relais médiatique aurait sa tendance politique, sa propre lecture des faits. Pour la majorité des citoyens, le problème se situe donc dans la multiplicité des interprétations.

On dénonça par ailleurs l’utilisation du conditionnel, les suppositions affirmatives et la fâcheuse tendance à placer en gros titre les formulations les plus accrocheuses et vendeuses. Les médias ne sont pas en dehors de notre société de consommation. Il existe bel et bien un marché de la presse. « On focalise l’information sur le sensationnel ». Les multiples feuilletons journalistiques sur la guerre en Afghanistan et sur le terrorisme aux États-Unis sont les rouages de l’information de consommation. « Mais ce besoin d’information n’est il pas artificiel ? » se pose quelqu’un dans la salle.

Il existe plusieurs formes de journalisme. Le journalisme d’investigation offre une analyse, une réflexion sur un problème particulier, un recul sur l’actualité. Les médias d’information recherchent simplement l’information. Qui plus est, « tous les journalistes se contentent de l’information brute reçue de l’A.F.P. (Agence France Presse) autour de laquelle ils brodent un journal ». « Il y a cinquante ans, il y avait moins d’informations. On ne s’en portait pas plus mal. Et en vacances, on s’en passait même. »

Car en plus de la mise en scène de l’information, on aurait créé et l’on entretiendrait chez le citoyen un besoin artificiel de se sentir informé. S’habituer aux flashs d’information développe « un sentiment de posséder la vérité ». D’ailleurs « si vous ne savez pas ce que tout le monde sait, vous passez pour un crétin », ajoute-t-on dans la salle. On montra du doigt aussi le couple Information/Publicité qui contribue à brouiller les pistes dans nos esprits. En combinant le monde de la publicité avec celui de l’information, on fait passer le spectateur d’un monde où l’on accepte la symbolique et l’allégorique à un autre où l’on exige une véracité irréprochable.

Attachons-nous maintenant au concept d’information. Un transfert d’information se réalise entre un émetteur et un récepteur. Pour qu’il s’agisse véritablement d’information, il faut que le récepteur s’en trouve changé. L’information est par définition utile car participant à la construction de l’individu. Or, rapporte-t-on dans la salle, « la pseudo information dont nous avons tant besoin ne fait que se répercuter sur notre affectif. Elle ne nous apporte rien en fin de compte ». Pire encore, « la surenchère d’information déstabilise par saturation notre propre construction intérieure ». Appuyant cette intervention, une citation de Jean-Jacques Rousseau : « le citoyen, suffisamment informé, pourra dès lors participer à l’élaboration d’un projet de société ». Nous sommes dans une société de sur-information et cette sur-information empêcherait notre citoyenneté de se développer. Encore faut-il s’entendre sur le mot « suffisamment » répond quelqu’un dans la salle. « Le citoyen ne doit-il pas s’intéresser à tout ? Sinon, c’est égoïste. Moi, je me sens citoyenne lorsque je suis informée de ce qui se passe à l’autre bout du monde, à Toulouse, etc. ». Mais le citoyen est-il un spécialiste en tout ? Un citoyen est-il mieux à même (et dans quelles mesures) de participer à la réflexion sur sa société parce qu’il est plus informé ? « Non, on réfléchit mieux sur la société lorsque l’on s’extirpe des effets émotionnels de l’information ».

De nos jours, « il y a à la fois surenchère d’information et déficit d’information ». On serait gavé d’informations, mais d’informations parcellaires, fragmentées, sans cohésion. Quel paradoxe insensé.
L’information « donne forme à ». Elle permet d’organiser, d’agencer les faits pour appréhender notre environnement. Elle combat le chaos. C’est un vecteur de construction. Mais de nos jours, « l’information médiatique donne une suite chaotique d’informations (les feuilletons journalistiques morcellent en épisodes les événements troublants), ce qui est contraire à sa fonction ». Quelqu’un donne alors un conseil : « Si j’ai besoin d’en savoir plus, plutôt que de m’en tenir à un journal télévisé, je me documente. J’achète la presse investigatrice. Je consulte une encyclopédie ».

L’information médiatique est unilatérale. Elle favorise la passivité. Et pour contrer l’information modelée, pré-mâchée, tronquée, contournée pour certains, bref stérile, il faudrait pouvoir exercer sa citoyenneté par l’expression. La recherche de la vérité s’élabore avec le plus grand nombre possible de réflexions. Mais « pour la plupart d’entre-nous, la vérité est quelque chose de réelle et d’unique ». Or, elle est difficile à percevoir. Qui plus est, il peut en exister plusieurs. D’où l’importance de confronter nos points de vue. Ce débat remit en question à bien des égards notre façon d’aborder l’information et ouvrit la question de la définition du citoyen.

Thèmes proposés pour le Café Citoyen du Samedi 11 Novembre 2001 :

- Qu’est-ce que le langage politiquement correct ?
- Qu’est-ce qu’être citoyen ? THÈME RETENU
- La place des religions aujourd’hui ?
- L’élu : serviteur ou maître ?
- L’urbanisme influence-t-il notre moral ?
- Existe-t-il un choc des cultures ?

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