Compte-rendu synthétique par Marc Houssaye — Café Citoyen de Caen (11/12/1999)
Animateur du débat : Marc Houssaye
» Politique et Société
La déontologie journalistique
Les médias ont, dans notre société, un rôle prépondérant. On parle même de quatrième pouvoir . Leur impact est indéniable ; l'environnement dans lequel nous vivons est imprégné de stratégies de communication. Cette puissance médiatique considérable devrait alors s'accompagner d'une déontologie, ensemble de principes auxquels seraient soumis tous les journalistes. La première étape consiste donc à s'interroger sur la justification d'une telle ligne de conduite. Nous avons ensuite montré que malgré la nécessité d'une déontologie, l'intégrité des structures médiatiques semble remise en question. Pour cela, il nous a fallu déterminer les contraintes imposées aux journalistes. Enfin, nous nous sommes intéressés à l'impact médiatique sur le citoyen.
Les structures médiatiques ont pour fonction de diffuser et de retransmettre des informations à un public. L'Histoire du journalisme moderne commence avec Théophraste Renaudot qui créa le premier journal hebdomadaire français : La Gazette (1631). Un ensemble de règles fut établi à cette occasion , d'une part la vérification des sources du journaliste, d'autre part la protection et l'anonymat des informateurs. Ainsi, dès lors qu'un intermédiaire tente de relater des informations pour les communiquer, une réglementation s'impose. D'emblée, l'accent est mis sur la responsabilité du journaliste.
L'information élaborée d'un article de journal et d'un bulletin télévisé reflète aussi le travail du journaliste qui apporte une valeur ajoutée à l'information brute qu'il a recueillie. Quelle est donc la part d'objectivité dans ce travail? Même si certains pensent que l'objectivité ne peut être atteinte - en effet, un article engage toujours le filtre subjectif de celui qui écrit- , nous pouvons dénoncer quelques dérives. Pour cela, il nous a fallu déterminer les pressions que peuvent subir les journalistes, celles qui les font dévier de leurs fonctions premières.
La contrainte financière est très prononcée. En effet, l'aspect commercial de l'information est indéniable. Les structures médiatiques subissent aussi les règles de notre société de consommation. L'information est devenue un produit et se consomme. La presse à sensations illustre parfaitement le côté mercantile des médias. Des procédés journalistiques paraissent en effet plus proches du cancan que de la véritable information. Observons l'utilisation intempestive du conditionnel dans la presse : "la cause du crash du Boeing pourrait être…" a fait les gros titres pendant des jours. On remarque alors que non seulement le journaliste ne vérifie pas l'authenticité de l'information mais qu'également il exploite plusieurs pistes susceptibles de faire vendre. D'autres intervenants soulignent la confusion largement répandue entre le journaliste et le présentateur télévisé.
La personnification de l'information est aussi un autre facteur commercial. Ajoutons à ceci la contrainte liée à la durée fixe d'un journal télévisé. Comment un journal peut-il être de la même durée tous les jours sinon en jouant sur le caractère élastique d'une information malléable? Enfin, d'autres journaux, à la recherche du "scoop", n'hésitent pas à bafouer les règles de la vie privée. Les paparazzis traquent les personnes célèbres jusque dans leur intimité. Le profit passe avant l'éthique. Ainsi, de multiples exemples nous montrent l'influence qu'exerce la société de consommation sur les médias.
L'impartialité du journalisme est aussi remise en cause. Pouvons nous réellement parler d'indépendance des médias vis-à-vis de la politique? On évoque aisément les manipulations médiatiques. Les journalistes ont le pouvoir de se taire sur des sujets et le pouvoir d'en mal traiter d'autres. Certains citoyens avancent qu'une telle manipulation peut influencer le vote des électeurs et mettent en exergue la corruptibilité au sein des corporations médiatiques.
La pression médiatique est donc énorme. Comment le citoyen peut-il se repérer dans ce contexte où l'information est surabondante? Nous devons tout d'abord avoir la possibilité de choisir notre information. L'éducation développe le sens critique d'un individu. Aussi est-il important, soulignent certaines interventions, de familiariser les enfants avec la presse et de les rendre capables de juger un article. Cependant, n'oublions pas que la société a su créer un besoin artificiel d'informations. Ne sommes nous pas dans un état de dépendance, esclaves d'un besoin factice? Notons que le développement de l'outil Internet nous donne de plus en plus accès à une information brute. Le "Feed", terme anglo-saxon, relie directement la source de l'évènement au lectorat. Deux grands types de médias semblent alors se révéler : d'une part ceux donnant accès à l'information brute - avec sa difficulté de lecture -, et d'autre part ceux proposant une information élaborée, politiquement colorisée et teintée de subjectivité.
L'influence du journaliste est indiscutable. Il possède une grande responsabilité, celle d'informer les citoyens sans déformer ni cacher des vérités. Cependant, les médias ne sont pas si indépendants qu'ils le paraissent. La société de consommation impose en effet ses règles. De plus, la connivence entre les médias et les politiques semble contraire à l'esprit démocratique.
En Bref, la réflexion citoyenne s'exprime :
La déontologie journalistique est un ensemble de règles que tous les journalistes doivent respecter. L'une d'elles est la vérification de l'authenticité des sources. Le respect de la vie privée est aussi un grand point de l'éthique du journalisme. Pourtant, ses principes sont bafoués. Le corps médiatique subit en effet des contraintes, d'une part, de la société de consommation qui l'amène à développer une presse mercantile et, d'autre part, des instances dirigeantes susceptibles d'entretenir d'étroites liaisons perverses.
Le citoyen doit donc redoubler de prudence quant à l'information qui lui est fournie. Il doit prendre conscience qu'il peut choisir entre plusieurs sources médiatiques. Le développement de l'esprit critique devrait l'aider à recouvrir un pouvoir citoyen, en l'occurrence celui de pouvoir voter en se laissant influencer le moins possible.
Notes :
- Déontologie :
1° théorie des devoirs, en morale.
2° Ensemble des devoirs qu'impose à des professionnels l'exercice de leur métier. (Le Nouveau Petit Robert)
- La dénomination de "quatrième pouvoir" fait référence à la démarcation des médias par rapport aux trois pouvoirs : exécutif, législatif et judiciaire.
- Théophraste Renaudot (1586-1653) : médecin et journaliste français.
Thèmes proposés pour le Café Citoyen du 5 janvier 2000 :
- Des remèdes contre le chômage ? 8 voix
- Le fait associatif est-il la seule possibilité pour recouvrer notre citoyenneté ? 6 voix
- L'embargo de la vache folle. 4 voix
- Le commerce prévaut-il sur les normes de sécurité ? 5 voix
- Les hommes politiques sont-ils des justiciables comme les autres ? 10 voix
- La conscience citoyenne mondiale. 3 voix
- L'impact de l'activité humaine sur l'environnement. 16 voix
Interventions
Globule
vendredi 17 septembre 2010 20:48:55 +00:00
Bonjour,
Que pensez-vous de l'article http://www.24heures.ch/actu/economie/miracle-wikipedia-2010-09-13 dont les commentaires critiques de Wikipédia ont tous été effacés et le dépot de nouveaux commentaires fermé. Il s'agit évidement d'un publi-reportage qui ne s'affiche pas comme tel, comment peut-on protester et auprès de quel organisme compétent ? Merci.
Cordialement
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