Compte-rendu analytique par Marc Houssaye — Café Citoyen de Caen (08/12/2001)
Animateur du débat : Marc Houssaye
» Religion et Spiritualité
La démocratie et la religion font-elles bon ménage ?
1 - A priori, ce thème je le trouve intéressant par rapport à l’actualité. On est dans un pays où la tradition républicaine a très vite voulu séparer l’Eglise et l’Etat. C’est au cours du XIXème siècle un grand acquis de la République. Maintenant cela pose une question de fond : la religion s’impose comme puissance métaphysique ou symbolique, etc., en dehors de la réalité. Et dans certains pays, elle souhaite avoir une emprise sur le concret et la vie des gens. Les pays islamistes notamment, où actuellement l’on voit la collusion entre Etat et religion. D’un autre côté, dans autre pays, la séparation franche entre les deux qui donne à chacun la liberté de conscience de choisir sa religion sans avoir peur des pressions. C’est un plus. Et cela crée un Etat qui réfléchit peut-être de façon différente à un avenir commun. La question de fond est : est-ce que la politique et la religion sont souverainenement distinctes ? Est-ce que notre combat à nous serait d’instaurer une religion démocratique ? Ou est-ce que ce sont deux choses complètement différentes ?
2 - On pourra peut-être rebondir sur la religion démocratique avec notamment la laïcité.
3 - La question est : Est-ce que démocratie et religion font bon ménage ? Je ne suis pas convaincu. Est-ce que les groupes, les masses, ont besoin de religion ? Je crois que oui. Parce que si l’on se place sur un plan où l’on a séparé l’Eglise et l’Etat et en plus on a mis en veilleuse, si je puis dire, des autoritarismes religions, on étouffe la religion. La démocratie est un équilibre instable qui fait que l’on ne peut pas vivre sans religion. Il se pose le problème d’un vide spirituel. Je crois qu’il faut partir de cela. On s’aperçoit que dans les pays musulmans, il y a une collusion entre un vide et un trop plein. Il y a l’image des sectes. Les gens cherchent refuge dans le spirituel qui ne leur apporte pas forcément quelque chose. Mais il y a une recherche. La démocratie pourrait fort bien s’accommoder de la religion dans la mesure où l’on respecterait plus la religion, et peut-être où l’on la promouvrait.
4 - J’ai vu un reportage ce matin sur l’excision des petites filles. C’est tout. Je trouve cela atroce. La religion s’impose dans les mœurs. C’est un excès.
5 - C’est vrai que des actes rituels peuvent heurter lorsqu’ils sont liés à des souffrances physiques notre sensibilité humaniste, mais toute religion impose des sacrifices, des douleurs. La religion catholique lorsqu’elle impose une vision de l’enfer, la pression morale que suppose le péché, la notion de péché, va entraîner des comportements dans la vie qui vont être aussi douloureux que…
6 - Oui mais qui apparaîtront plus tard.
7 - Oui, mais qui empêchera certainement une jeune femme de s’épanouir. Toute religion impose des contraintes morales. Alors c’est vrai qu’à la rigueur pour la religion catholique c’est plus tard.
8 - On peut peut-être essayer des distinguer la religion en tant que pouvoir et la religion entre les hommes de façon général.
9 - On vit en France dans un pays laïc. Et cela n’empêche pas qu’il y ait plusieurs religions dans le pays qui s’exercent librement sans contrainte. Je me demande si dans certains pays totalitaires comme l’Allemagne à une époque où même la Russie, le manque de religion n’est-ce pas plus grave que la religion. C’était interdit sous Hitler. Sous Staline aussi. L’apparition des sectes vient d’un vide. Les jeunes et les moins jeunes se jettent dans ces choses dangereuses.
10 - Le mot religion veut dire « qui relie ». Mais qui relie quoi ? Des individus à un Etre Suprême. Il ya aussi une intemporalité. Je dirais qu’aujourd’hui nous sommes dans un système de temporalité. Et puis pourquoi cherchons-nous à rentrer dans les groupes constamment ? Soit une famille, soit dans une démocratie, soit dans un esprit politique. C’est parce que les gens ont peur, alors les gens se regroupent. Pour essayer de traduire nos sentiments. Nous sommes dans un système matérialiste. Il ya à lutter contre cela. Et à promouvoir l’intériorité de l’Homme.
11 - Vous dénoncez la société matérialiste. A priori il y a des aspects positifs de la religion, vous semblez le dire. Il y a aurait un vide spirituel, qui empêcherait les gens de se rassembler, qui même bloquerait les gens dans l’individualisme.
12 - Je voulais simplement dire cela : Sur le port du voile à l ‘école. Notre démocratie qui se veut absolument prudente sur les appartenance religieuse a fini par interdire, je pense que c’était cela, ou tout du moins conseiller aux élèves de ne pas porter le voile. Et là déjà, il aura peut-être fallu pour pouvoir accepter une religion faire une geste un symbole pour que les gens puissent porter un chapeau, un voile, etc.
13 - La démocratie et la religion ont toujours fait bon ménage. Au temps des rois, ils s’entendaient pour gérer le peuple. L’un s’occupe de l’âme et l’autre du portefeuille. Aujourd’hui c’est un peu cela, la démocratie s’occupe du pouvoir, de gouverner, etc. En Arabie, il est sûr que d’un côté il ya un qui s’occupe de l’âme et l’autre du pouvoir. Et c’est bien séparé. Cela marche bien pour l’instant. Chez les Talibans, certains s’occupaient de l’âme, d’autres de la finance. En France c’est pareil. Je n’ai jamais vu vraiment de heurts entre la religion et la démocratie et le pouvoir. Chacun a prit « son territoire ».
14 - On peut dire aussi qu’il y a deux cents ans, le pouvoir religieux était totalement différent d’aujourd’hui. Il y a quand même eu des heurts à ce moment là. Il fallait démanteler ce pouvoir pour installer la démocratie.
15 - Cette alliance entre démocratie et religion, je ne suis pas tout à fait d’accord. Je pense que cela dépend des religions si elles donnent et laissent la conscience d’être citoyen et exercer sa citoyenneté. En l’occurrence, je ne sais pas si l’Islam convainc ses adeptes d’être citoyen. Et aussi peut-être chez les juifs. En Israël…
16 - Je crois qu’au nom de la religion, on peut faire le mieux et le pire. Alors d’un côté lorsque vous voyez l’Islam, vous avez d’ailleurs le Coran qui indique un comportement de vie plus que normal. On pense aux autres, il ne faut pas tuer. On voit que c’est détourné par des chefs religieux qui ne sont pas religieux du tout et qui veulent le pouvoir. L’amour du pouvoir est encore pire que l’amour de l’argent. Et ces gens là veulent dominer cette population qui comprend à peu près 90% d’analphabètes. Et je crois que d’autres part dans certaines religions quand on voit par exemple sœur Thérèsa, des tas de gens qui se dévouent au nom de « aimez-vous les uns les autres », on voit que l’on peut atteindre les deux extrêmes. Je crois que tout le monde a besoin de savoir qu’est-ce que la religion. C’est la question de la mort. C’est ça le problème qui angoisse tout le monde. Que l’on dise « moi cela m’est égal », ce n’est pas vrai. Tout le monde se pose la question de l’après. Et je crois que la religion est le moteur de tout cela. Seule la culture peut faire que les gens ne se laissent pas influencer ni impressionné au nom des religions. Le fond de l’histoire, c’est la culture, l’instruction, pour permettre aux gens de raisonner et de réfléchir.
17 - Je vais ajouter quelque chose. On est confronté aujourd’hui au terrorisme avec des gens qui n’ont pas idée de la mort justement. Je parle des kamikazes. La mort devient une monnaie d’échange. Que peut-on répondre à cela ?
18 - Tout ce qui est vertical et qui pose le problème de la puissance pose toujours problème. Je crois que nous sommes citoyens, nous sommes sur une planète ronde. Je crois que l’on devrait plus axer nos efforts sur le plan horizontal avec le partage. Et la religion peut aider la démocratie pour qu’il y ait ce partage. J’ajoute que quelque soit la religion, il y a toujours le phénomène de l’idolâtrie qui est un piège.
19 - Le problème c’est l’interprétation des livres sacrés : le Coran, le Talmud.
20 - A supposer que les religions ne s’excluent pas, même si le dieu des Indes n’est pas le même que le dieu des autres. Le communisme ne s’est pas fait. C’est une utopie peut-être. Est-ce qu’il n’y aurait pas une refonte de la société vers une démocratie tout à fait idéale ?
21 - J’essaie de voir pourquoi les religions et le politique se sont autant commis l’un avec l’autre. A mon avis déjà, par le pouvoir que les religions a sur les individus, de part les réponses qu’elles apportent au phénomène existentiel, les pouvoirs ont tout de suite compris qu’ils pourraient en tirer une légitimité. Il est évident que dans un pouvoir de type monarchique ou usurpé, on doit être légitimé, et on peut l’être par un souffle divin, qui permet de donner à la population une raison pour que la personne au pouvoir y soit. Deuxièmement, pourquoi est-ce que l’on peut sortir de la religion par la culture ? Parce que longtemps la culture a été le domaine de la religion. A priori les religieux ont une activité qui socialement semble assez peu intéressante. Par rapport à des agriculteurs. La personne qui veut réfléchir au problème de la mort n’a pas d’utilité directe dans la société, elle doit donc se trouver une légitimité. C’est la deuxième raison qui fait que les systèmes religieux ont eu tendance à prendre le pouvoir pour s’autodonner une légitimité. Troisièmement, euh, j’avais un troisièmement. Un des premiers métiers de la réflexion, on faisait ses thèses en latin jusqu’en 1923. C’est Bergson qui a fait la dernière thèse en latin dans le milieu universitaire. Le troisième point ne revient pas…
22 - Vous avez utilisé des mots qui m’interpellent : l’utilité, le rendement. Et pourquoi pas le rationalisme ? Est-ce que cela suffit à faire un monde humain. Je pense que l’on a besoin de choses un peu plus éthérée, une recherche du spirituel qui se dépouille de l’utilitarisme. A faire que tout soit utile, je ne suis pas sûr que cela tende vers le bonheur de l’homme.
23 - Alors c’est vrai que nous sommes en train de chercher ce que peut apporter de bénéfique la religion. On peut essayer à notre échelle de savoir ce que nous apporte le sentiment religieux.
24 - Karl Marx disait que la religion est l’opium du peuple.
25 - Il y a peut-être des religions qui laissent libres la conscience humaine. Parce que sommes toute la religion est quand même une affaire personnelle ?
26 - Est-ce que l’on ne pourrait pas séparer la conscience du citoyen et puis la conscience spirituelle ?
27 - La religion, c’est quelque chose qui relie les hommes. On pourrait repartir sur cette base générale.
28 - J’ai conscience que c’est un thème difficile. On a beaucoup de préjugé sur la religion et sur la démocratie. On peut tout de même revenir au sens premier des mots et faire des liens. On essaie de distinguer pour l’instant ces deux notions quitte à les opposer mais peut-être pouvons nous leur trouver des bases communes ?
29 - Oui il y a des ponts, certainement. Mais on voit d’ailleurs dans les sociétés anciennes, on ne peut plus dire primitives depuis Levi Strauss, que par exemple il y a toujours mixité d’un chef qui agence la société et d’un gourou qui guide les individus dans leur réflexion. C’était mon troisième point de tout à l’heure. (intervention n°21). Le fait que ces deux pouvoirs coexistent et que l’un puisse avoir plus de pouvoir que l’autre sur le peuple a crée toujours des tensions. L’une des résolutions possibles de cette résolution est que l’un des pouvoirs annule l’autre. Il y a eu sauf période d’équilibre toujours tentative de phagociter un pouvoir par l’autre. Les religions naissantes qui sont persécutées ont la possibilité de subjuguer le peuple et de prendre le pouvoir. Elles avaient le pouvoir parce qu’elles détenaient le savoir. Et puis lorsqu’il y avait équilibre entre les pouvoirs l’un devait légitimer l’autre. Je pense que naturellement il y a tendance à phagociter pour pouvoir maîtriser l’autre pouvoir qui est dans un autre registre. Je pense qu’il y a une peur réciproque. Chose qui s’est passé à la Révolution. Les principes de laïcité sont une manifestation de cette peur du pouvoir religieux.
30 - Sous la révolution est-ce qu’il n’y avait pas quelqu’un que l’on nommait l’Etre Suprême ? Quelque chose comme ça ?
31 - Justement la Révolution Française qui s’appuie principalement sur les idéaux rousseauistes. Ont suivit, notamment avec les révolutionnaires de la Constituante, certains principes qui voulaient substituer à la religion d’Etat une religion civile. Et donc faire de la citoyenneté un moyen de communion entre les individus et cette communion permettait aux citoyens en prenant leur part active de la volonté générale d’intégrer un corps plus vaste qui les dépassait. Ce corps plus vaste avait le nom d’Etre Suprême. C’était la collectivité politique qui devenait l’espace d’émancipation. Il y avait une véritable lutte avec les religions qui présentent le Dieu comme quelque chose d’extérieur qui impose aux hommes. Là, avec Rousseau, avec la religion civile, on a un « Dieu » entre guillemets, une émanation qui du groupe des individus permet de créer un être collectif qui est maître de son destin.
32 - On voit ici qu’il y a plusieurs façons de voir la religion.
33 - Justement, effectivement, là où la démocratie et la religion ne peuvent pas faire par essence bon ménage, c’est que la religion impose à l’homme une vision du monde qui est totalement décorellé de l’homme lui-même. La démocratie se propose au contraire que l’homme ait lui-même la vision de sa propre société, et du monde dans lequel il veut vivre, en fait qu’il soit maître de son propre destin. C’est en cela que religion, du moins religion révélée du Livre telle qu’on l’entend actuellement, et démocratie ne peuvent pas fair bon ménage. Par contre, là où la démocratie et la religion peuvent cohabiter c’est au moment où les citoyens se retrouvent sur des choses fondamentales qui les unissent. Je crois que la religion peut à sa manière proposer ce genre de chose. On voit bien que l’une des déviance de la démocratie, et du culte – j’emploie ce mot là à juste titre – de la liberté entraîne une individualisation croissante allant à l’encontre de l’égrégor collectif dont il a été question avant (intervention n°31). La religion elle, par ses fondements et ses principes moraux, propose quand même un rassemblement. Je crois que, et c’est peut-être pour cela que l’on a voulu faire une religion civile, je crois qu’il faut se méfier du fait que chacun soit libre totalement. Finalement, qu’est-ce qui va faire que l’on se retrouve ? Qu’est-ce qui va nous donner envie d’avoir une action commune qui nous dépasse chacun et qui fait que ‘on construit ensemble une société ? C’est peut-être le point de conjonction entre démocratie et religion. Un endroit où les citoyens se retrouvent hors du dogme. Seulement, c’est pas forcément simple puisqu’à priori pouvoir religieux et démocratie s’opposent. Je pense que l’on pourrait trouver quelque chose de mitoyen, alors c’est vrai la Révolution a été l’occasion de proposer une religion civile qui a échoué. Ce qui peut-être « échoue » actuellement dans nos société démocratique c’est à finalement prôner le liberté de conscience on se retrouve avec des gens qui confondent liberté de conscience et « j’ai le droit de penser ce que je veux, où je veux et quand je veux ». Ce qui fait qu’il n’y a plus cette union nécessaire à la construction collective. On a l ‘impression que l’on se compromet un peu si on donne une part de cette liberté quasi absolue si en fait on a des actions communes et des choses ensemble. On a plus du tout cette notion de groupe.
34 - Alors pour vous c’est cette notion de liberté qui est dévoyée. On peut rappeler qu’en France la notion de liberté est contrebalancée dans le triptyque républicain de l’égalité et de la fraternité. Que l’une de ces notions n’est rien sans les autres.
35 - Moi, je ne suis pas très calé en géopolitique. Mais je trouve que les protestants sont peut-être plus stricts sur le respect qui est imposé par les lois de son pays. Je crois que la religion doit évoluer dans le sens elle intégrera dans ses dogmes le respect de la loi civile.
36 - Oui je trouve que le protestantisme est une religion qui se rapproche du peuple. Les pasteurs peuvent se marier, ont une famille. Les femmes pasteurs ont un rôle un petit peu d’assistante sociale. C’est quelque chose de plus convivial. Une autre question : pouvons-nous vivre sans religion ?
37 - On a parlé de la religion qui tente d’apporter une cohésion à l’ensemble de la société. On a parlé de la démocratie qui essaie de dégager une volonté commune, une volonté générale. Peut-être devons-nous nous intéresser à cette volonté générale.
38 - Oui, le protestantisme est à la base une première approche de cette volonté de séparation du religieux et du civil. Si je me souvient bien, le jeune moine luthérien, quand il placarde sur la porte de l ‘église tout ce qu’il reproche à la religion catholique dominante dans son pays, c’est justement tout un tas de choses qui fait que la religion est liée au pouvoir. Et qu’il faut retourner à une certaine sobriété dans un véritable acte religieux. En cela, le protestantisme a l’air en effet d’être une démarche de la part des religieux - on a souvent l’impression que la démocratie exclue la religion – où le protestant refuse le pouvoir. Ce cas est très intéressant.
39 - Luther a prôné la mort de la religion. Il y a des différences surprenantes entre les églises françaises et les églises allemandes. En Allemagne, il n’y a pas de statue, c’est très dépouillé. Oui, sinon, quand il n’y a qu’un seul groupe qui domine dans le monde, c’est pas bien, il faudrait un deuxième groupe qui puisse les surveiller.
40 - On peut aussi réfléchir à des solutions que vous voudriez apporter, qui apporterait plus de religieux, plus de spirituel, de communautaire à notre démocratie qui tombe dans l’individualisme.
41 - Les démocraties occidentales sont très imprégnées de religion. J’ai appris lors d’une conférence que le drapeau européen est inspiré de la religion chrétienne. Les douze étoiles symbolisent les apôtres. Le bleu est le bleu marial (relatif à la vierge Marie). J’ai été surprise. Les américains sont très religieux. A cette conférence j’ai appris aussi que si l’Europe tardait à faire entrer la Turquie, c’était principalement parce que la Turquie était un pays musulman.
42 - Tout à l’heure, on a fait la différence entre religion et spiritualité. Dans nos démocraties occidentales, où l’individualisme est très fort, le religieux s’efface et le spirituel apparaît de plus en plus fort. Cette apparition du spirituel dénote peut-être un manque d’esprit religieux justement.
43 - C’est vrai que vis à vis de la construction européenne, la France notamment qui est un pays qui est allé le plus loin dans l’idée de séparation de l’Eglise et de l’Etat, a fait entendre sa voix au dernier colloque qui s’est passé à Nice parce qu’en effet les textes de déclaration fondamentale de la construction politique de l’Europe il était question d’un préambule qui satisfasse à tout le monde et dans ce préambule, il était question de référence explicite à Dieu, etc. Parce que cela faisait partie de la conscience de certains pays, il y a des pays européens aujourd’hui qui dans leur constitution font apparaître le mot même de Dieu et qu’ils sont majoritaires même ; On pourrait se retrouver effectivement au niveau européen sous les auspices de Dieu. En temps que pays laïc, la laïcité est à défendre en ce moment, c’est évident.
44 - Pourquoi pas créer des maisons de la culture des religions, un lieu où toutes les religions sont rassemblées et que chacun fasse sa spiritualité comme il l’entend. Il y a un endroit de religion, ce sont les salles de concert, la musique. La spiritualité permet de se retrouver personnellement, d’intérioriser. On met tellement à contribution l’homme au matériel qu’il oublie son intérieur. Il est dans sa voiture, etc. Je suis presque sûr qu’il y a des gens qui n’ont pas mit les pieds depuis dix ans vingt ans qu’ils n’ont pas mit les pieds dans une église ou dans la nature. Ne serait-ce qu’un endroit de la nature ! Cela fait du bien de toucher la nature, seul ou à plusieurs. La matérialité est une façon de temporiser l’individu. Elle est excessive. On a besoin de paix, de se retrouver avec soi-même.
45 - Je ne sais pas si je me trompe mais la spiritualité poussée à son extrême ne touche-t-elle pas le mysticisme ? Le mysticisme n’est-il pas un phénomène purement individuel ?
46 - Au passage, je voudrait dire que petit à petit on s’éloigne de la démocratie.
47 - Au lycée, on avait la visite d’un aumônier qui faisait l’éducation religieuse, moi je n’y allait pas, j’était pas très fervent, mais un jour j’y suis allé, en courant même , pas en Coran, mais en courant, c’était un prêtre qui était d’ailleurs spécialisé de la géométrie des cathédrales, peu importe, il était venu accompagné de musulmans. C’était en 1952. Il avait fait des comparaisons et on s’était aperçu de nos similitudes. C’était incroyable. Je reviens à la proposition de la maison des religion, à l’eucuménisme.
48 - Au delà de l’aspect dogmatique de la religion qui s’opposerait à priori à sentiment démocratique, je crois qu’il y a un autre aspect qui s’oppose, c’est l’aspect cultuel des religions. Le culte permet à un moment donné que le groupe se retrouve autour d’un emblème commun, à vue d’adoration. Cette figure cultuelle, je ne parle de symbole, pour moi va à l’encontre de ce sentiment de liberté de conscience puisque l’on se retrouve dans un état où l’on n’a plus besoin de réfléchir, l’emblème commun étant appréhendé par tout le monde de la même façon. C’est d’ailleurs pour cela, madame disait tout à l’heure, que le nazisme et le stalinisme était anti-religieux, certes, mais ils étaient tous les deux cultuels. Ce qui entrainaient ces grands mouvement de foule. Ce qui distingue religion et démocratie, c’est que là où la religion propose des figures emblématiques, la démocratie propose les symboles qui sont flous et qui donnent lieu à des interprétations. Le simple fait d’interpréter le symbole de façon différente, permet de retrouver une union pas aussi forte, puisqu’elle serait volontaire, comprise, et chacun aurait sa vision de ce que l’on a appelé à la Révolution l’Etre Suprême. Le Dieu chrétien est bien défini, comme l’enfer, le paradis, etc. La figure de l’Etre Suprême est déjà moins bien défini. Qu’est-ce que c’est que la conscience collective, que l’égrégor. Ce sont des notions qui ne sont pas emblématiques. C’est peut-être dans cet espèce de compromis qui n’est pas un culte mais qui est quand même un rassemblement face à une figure que chacun peut appréhender à sa manière.
49 - Vous parliez de la représentation. La difficulté de représenter l’Etre Suprême. On voit une statue blanche. C’est pas très bien défini, c’est vrai. Mais imaginez que vous ayez l’habitude d’une représentation d’un Dieu, et puis que vous vous retrouviez dans une mosquée, j’ai fait l’expérience, on se dit mais si Dieu existe ce n’est pas le même, on ne le sens plus.
50 - La démocratie a peut-être cela de particulier qu’elle permet à chacun d’entre nous de participer à la construction collective, ce qui n’est pas le cas de la religion où l’on ne peut pas remettre en cause le dogme.
51 - J’ai quelques points à éclaircir. Je m’exprime dans la limites de mes neurones. Pour moi, lorsque l’on dit que l’individualisme supplante notre société, je ne suis pas sûr que c’est une mauvaise chose. L’inverse de l’individualisme, c’est la masse. Quand la masse est lancé dans le mur, elle va droit dedans. J’ai une vision moins poétique de la construction de la société ; Je ne crois pas que ce soit une volonté partagé par tous. Je crois plutôt que c’est un besoin. Si la démocratie et la religion existe, c’est pour répondre à un besoin. L’homme ne peut pas vivre tout seul. En France on disait que l’on acceptait beaucoup de culture et que, la séparation de l’église et du politique est bien faite, je n’en suis pas certain parce que lorsque vous faites dons de biens à l’église, il n’y a aucune taxe, vous n’êtes pas imposé. En revanche, si vous le faites à votre fils, vous l’êtes. Et pour revenir à la question « est-ce que religion et démocratie font bon ménage ? », je me suis posé la question : pourquoi la religion existe ? Parce que l’homme vient au groupe, pour une question de survie. La religion est nécessaire parce que l’homme se pose des questions et il a peur de la mort, parce que c’est l’inconnu, des limites, qu’elles soient physiques ou métaphysiques, de tout ce qui nous dépasse. La religion répond à ce besoin. L’homme au lieu d’admettre qu’il est limité, continue à rechercher. Pour moi, la religion n’est pas nécessaire. Si l’homme reste sage et admet qu’il est limité, la religion n’est plus nécessaire. Pour moi, on est tous religieux, spirituel. Ensuite intervient le pouvoir, la hiérarchie. La démocratie est le régime le plus sain. On ne devrait pas se poser la question du bon ménage de la religion et de la démocratie, puisque la religion devrait seulement s’occuper de l’âme et de l’au-delà. La démocratei devrait s’occuper de l’organisation de la société et du concret. La démocratie est une structure nécessaire à l’homme et la religion est quelque chose de l’ordre du choix.
52 - Vous avez définit les limites de la religion (abstrait) et de la démocratie(concret). C’est justement ce que certains remettent en cause. Pour moi la réelle différence entre ces deux notions, elle est là. Et pas forcément dans l’emblèmes ou le symbole. Dans la religion, Dieu est représenté par un rayon de lumière, quelque fois par un triangle avec son nom dedans. Allah veut dire « celui qui n’est pas », on ne peut pas le représenter. A l’inverse, la démocratie a ses emblèmes. Dan la constitution, c’est marqué, la République Française a pour drapeau le bleu, blanc, rouge, son champ est la marseillaise, son emblème est le coq. La différence c’est que la religion impose par la nature même du Dieu une nature hiérarchique, que les individus obtiennent leur ordre d’une structure pyramidale, le Dieu, son gouvernement proche l’Esprit Saint et Jésus, etc… On est inféodé. Alors que la démocratie dit que le sens et ce que l’on construit vient de tous, et que chacun de nous possède une partie de ce qu’il souhaite pour l’avenir. On veut le limiter au concret, pourquoi ? Cela peut être aussi en terme de réflexion sur ce qu’est l’humanité, etc. Le combat entre démocratie et religion est toujours permanent. Il est juste de contredire ces deux visions différentes, soit que le pouvoir vient d’en haut et que l’on ne peut le remettre en cause parce qu’il émane d’une intelligence supérieure et donc qu’elle est véritable (que ces soit un Dieu ou un monarque), ou alors le pouvoir vient de la base, ce qui est logique de la démocratie, et ce que l’on reproche souvent à la démocratie, c’est que la base peut se tromper, mais la démocratie, c’est cela aussi, les individus sont libres de se tromper également et d’avancer dans le sens qu’ils veulent.
53 - Oui, une réponse (à l’intervention n°51). Vous avez souligné que la démocratie devait s’occuper du concret et la religion de l’abstrait. Il me semble que dans l’un comme dans l’autre, il y a une notion d’élan qui fait que l’on ait pu faire une religion de la démocratie. Une autre réponse (à l’intervention n°52), les emblèmes définis, le coq, etc., sont des emblèmes de l’Etat. J’ai parlé tout à l’heure (intervention N°48) des symboles de la démocratie. On a souvent tendance à confondre Etat, nation et démocratie parce qu’en France, nous sommes dans un Etat nation démocratique, mais ces trois notions sont différentes.
54 - Alors soulignons effectivement que la démocratie qui est une conception politique contient quelque chose de tourner vers l’avenir, d’un projet, qui ne s’occupe pas du concret mais des aspirations communes.
55 - Pour préciser, je trouve que la religion s’est imposée pour répondre à des besoins, je n’ai pas dit que la religion répond à ces besoins.
56 - L’individualisme exclut des gens aussi. Ce n’est pas forcément bénéfique. C’est notre société d’exclusion.
57 - Je voudrais parler d’un fait d’actualité, de la persécutions des chrétiens par les musulmans. Il est grand temps que l’on combatte le mal. [ Intervention dogmatique ].
58 - Essayez de vous intégrer au débat monsieur.
59 - Oui, mais moi je pense que le jour où l’on meurt l’esprit s’en va. Que notre espérance de vie est fixée dès notre naissance. Je me perd parce que je n’ai pas écrit… Notre esprit quitte le corps pour rejoindre un tribunal céleste… où il est jugé. [ Intervention dogmatique ].
60 - Je ne vous reproche d’exprimer vos idées, par contre le débat c’est aussi s’intégrer dans un groupe.
61 - Je vais parler de ma fille. On est libre de choisir dans notre pays de choisir notre religion. Moi, j’ai voulu que ma fille soit pourtant baptisée. Je préfère donner des repères à ma fille quitte à ce qu’elle les remettent en cause plus tard. J’essaie de lui donner un esprit critique aussi. Je lui donné des repères pour qu’elle n’ait pas l’envie plus tard, par un besoin spirituel qu’elle n’aurait pas eu plus jeune, d’intégrer des sectes.
62 - Je pense que toutes les religions disent de très bon conseils, le respect, la tolérance, etc. Je ne pense pas qu’il y ait besoin de religion pour pratiquer ces concepts. Et cela veut dire aussi en ce qui me concerne de tolérer que d’autres aient des religions.
63 - Quelque chose m’a toujours frappé, c’est que l’on ne laisse pas à l’enfant le droit de choisir. Il faut savoir que lorsque le père est de l’Islam, les enfants sont de l’Islam, chez les juifs, c’est la mère qui donne la religion. Je crois qu’il faudrait donner une culture religieuse à l’enfant, plutôt que de lui inculquer une religion d’emblée et puis un jour ils choisiraient.
64 - Pour abonder dans le sens de monsieur. Je trouve que c’est une bonne proposition. Mon enfant n’est pas baptisé et est inscrit dans une école catholique. Il ne subit pas la pression que les écoles religieuses imposent. Il y a une culture mais pas « endoctrinement ».
65 - Je pense que lorsque l’on est imprégné d’une religion, on peut plus facilement la remettre en cause. Et c’est ce rétablissement qui compte.
66 - Je voulais dire que j’étais totalement d’accord avec monsieur au fond qui lisait ses petits papiers (interventions n° 57 et 59). Ce qu’il a exposé, cela ne peut de toute façon pas être débattu en assemblée. Cela ne peut pas faire l’objet d’un projet collectif. On y croit ou on y croit pas. Et moi je suis convaincu aussi que lorsque je vais mourir, mon âme va aller au tribunal et si j’ai fait des bonnes choses mon âme va rejoindre des tas de petites anges féminines avec des gros seins.
67 - Vous rajouter des choses là.
68 - Et si je vais en enfer, etc. Cela ne pourra jamais faire l’objet de débat. Cette vision là est du domaine religieux personnel.
Interventions
Jacques
jeudi 11 avril 2013 11:55:08 +00:00
La question en débat, la démocratie et la religion font-elles bon ménage, supposait que religion et démocratie soient deux entités distinctes...or c'est souvent faux : une croyance partagée par plus de cinquante pour cent des habitants d'un pays est "démocratique" au regard de l'arithmétique administrative habituelle...surtout quand on sait que toutes les lois électorales sont volontairement foirées !!!
L'existence ou non d'un clergé ou même d'un pontife romain-infaillible, ce n'empêchait pas d'être populaire...grâce à un partage du travail bien rôdé : le haut-clergé distribuait les indulgences et le bas-clergé à mobilette, les prunes !!!
Appliquée aux écuries électorales "laïques", on obtiendrait mêmes réponses à la question : certaines sont alliées ; toutes sont concurrentes ; toutes sont solidaires du système qui les a vu prospérer ! Bien pis, bien mieux, pour mériter le titre de laïcs, faudrait-il que politiciens et militants-de-base acceptent d'être jugés tous les cinq ans à leur oeuvre temporelle !...
La vraie problèmatique ne passait-elle pas plutôt entre l'individu isolé et les généralissimes élus ?!? Faire passer des religions hyper-codifiées depuis des lustres comme relevant de la conscience de chacun, n'était-ce pas déjà un vrai abus de langage ?
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