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Compte-rendu synthétique par Céline ChabutCafé Citoyen de Saint-Denis de la Réunion (21/05/2013)

Animateur du débat : Céline Chabut

» Éducation

Addiction et responsabilité

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COMPTE-RENDU DU DEBAT
Addiction et responsabilité

Un grand merci avant tout au Dr Lederer, chef de service en addictologie à l’hôpital de St Benoît-St André, qui est venu avec plusieurs membres de son équipe, infirmières et aides-soignantes. Merci aussi au Réseau Oté qui a participé à ce débat.

- Une conduite addictive est un lien entre un individu et quelque chose, ancré dans la durée. Le Dr Lederer rappelle quel l'Organisation mondiale de la santé (OMS) définit la dépendance comme : « un état psychique et parfois physique, résultant de l'interaction entre un organisme vivant et un produit, caractérisé par des réponses comportementales ou autres qui comportent toujours une compulsion à prendre le produit de façon régulière ou périodique pour ressentir ses effets psychiques et parfois éviter l'inconfort de son absence (sevrage). La tolérance peut être présente ou non. »
- A cette addiction, le système judiciaire propose une réponse pénale, pour la drogue, l’alcool, les jeux.
Maître Léopoldine Settama rappelle que l’alcool et les drogues entraînent des conduites déviantes (au volant, violences conjugales…), ont un effet désinhibiteur, pouvant aller jusqu’à l’agression sexuelle. Les drogues comme le zamal entraînent parfois des agressions physiques gratuites.
Cependant, très peu de personnes qui boivent passent à l’acte. Et la plupart des personnes qui boivent le font d’une manière exceptionnelle.
- L’addiction s’installe dans la durée, elle suppose une prise d’habitude. Addiction signifie « lié à ». L’individu a perdu sa liberté. Il restitue une forme de dette (Idem pour l’anorexie ou la boulimie). Le lien se crée et se dirige vers la dépendance. L’addiction est une recherche régulière, qui, si elle n’est pas satisfaite, entraîne une sensation de manque. (Le tabac est la drogue la plus addictive !) L’anorexie, par exemple, comporte une jouissance de l’éradication de la sensation de faim.
- Quelles sont les causes, les prédispositions ?
L’addiction repose sur « le circuit de la récompense » : ce sont les conduites instinctives (Pavlov). Le noyau primaire, inné, recherche du plaisir, c’est-à-dire de la dopamine et des endomorphines. Ces conduites instinctives se renforcent à l’aune des référents parentaux. Nous sommes donc conditionnés, et tous vulnérables, surtout à l’adolescence, où l’individu recherche des sensations fortes.
- L’individu est capable de prévenir ses propres addictions (ex : addiction au chocolat on n’en achète pas !) ; mais la violence passive vécue dans les familles, notamment lorsque l’un des membres est alcoolique, fait partie des facteurs de vulnérabilité familiale. On n’est donc pas tous égaux devant les substances : même la différence des sexes joue un rôle.
- Résister à ces déterminismes génétiques ou familiaux : comment ? En fuyant l’enfermement de l’alcoolisme dans une famille, où l’alcool et la violence vont souvent de pair. Dans un cadre éducatif, scolaire, une addiction est un facteur aggravant du comportement.
- Quelle est la responsabilité de la société dans l’instauration des addictions ? L’augmentation du tabagisme chez les femmes est le fruit d’une opération marketing de taille. La société crée donc des dépendances !
- Le schéma habituel de la mise en place d’une addiction est le suivant :
1. Expérimentation (importance de la transgression dans la mise en place des conduites addcitives); 2. Habitude (on ne s’en aperçoit pas) ; 3. Dépendance, servitude. Une personnalité pathologique peut alors se développer (phobies sociales, risques suicidaires).
- Quand le choix d’arrêter n’est pas fait : comment peut-on agir sur le plan pénal ? Le soin s’accompagne d’une obligation d’aller voir le médecin. Mais l’individu sait-il qu’il est addict ? Le médecin n’est pas un auxiliaire de justice. Il peut agir seulement si le patient est volontaire. Sinon, il le renvoie…Parfois seulement, la prise en charge est spontanée, ou sur conseil de la famille, ou du médecin.
- Le soin réel passe par l’apprentissage, l’éducation et l’information de l’individu. La répression ne sert pas à grand-chose, sinon à engorger les prisons et enrichir les Etats (même si des sanctions doivent être posées, elles ne résolvent pas le problème de fond). Il faut aussi le pousser à se repositionner, à prendre conscience des problèmes posés par son addiction pour lui et pour son entourage. Il doit (re)devenir responsable de lui-même et reprendre le dessus sur son addiction et ses comportements. Il y a souvent un trouble dépressif à la base de l’addiction (rappel : l’alcool est un désinhibiteur et un anxiolytique, pais aussi un dépressogène). Il faut aussi soigner les comorbidités. Tous les aspects de la personnalité doivent être pris en compte pour accompagner le patient. Il faut soigner l’altération de l’image de soi et travailler sur l’estime de soi.
- Le sevrage est effectif ans 40% des cas. 20% deviennent complètement abstinents. Le but est de contrôler son addiction, et de réduire les risques. Comme le précise le Réseau Oté, les individus ont souvent du mal avec la réduction des risques. Or il s’agit de responsabiliser les individus face à leur geste. La question est : comment consommer sans se mettre en danger ?
- On souligne l’importance de la prévention, dès le primaire. Les addictions sont un problème de santé publique. Le syndrome d’alcoolisation fœtale (SAF) concerne 10% des grossesses. Dès le premier gramme d’alcool, le fœtus est atteint, et peut être concerné par les malformations, les troubles de la natalité, la déficience intellectuelle.
- La prévention devrait aussi se faire au niveau des médias, et notamment de la publicité. La société de consommation pousse les individus à agir selon le « je vois, je veux », dans l’immédiateté.
- Les prisons devraient jouer un rôle de rééducation, de réhabilitation.
La question des salles de shoot est actuellement discutée ; des expériences sont menées en milieu urbain afin de permettre aux toxicomanes de consommer dans des lieux sécurisés et encadrés. Cela fait partie du travail sur la réduction des risques. Les médecins aident les patients à se sortir petit à petit de leur souffrance et de leur dépendance, et cela permet d’éviter la recherche effrénée de la drogue, souvent liée à la violence et à la prostitution.

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