A quoi sert la prison ?

Pour les intervenants qui ont pu de près ou de loin fréquenter la prison à titre éducatif, le milieu carcéral est générateur de violence, de frustration, et l’on constate malheureusement que le taux de récidive à la sortie est très élevé. Dans ces conditions on peut se demander à quoi sert effectivement la prison.

Face à cette question les intervenants ont estimé que le rôle principal de la prison était de sanctionner les individus coupables de méfaits en les privant de liberté. On les met provisoirement à l’écart de la société afin de protéger les citoyens. Ceci est vrai pour les pays démocratiques où les sanctions sont établies à partir du Droit. Cependant il est regrettable de constater que la prison engendre beaucoup de phénomènes de violence, de maltraitance, de trafic… Un spécialiste du milieu constate : « les maisons d’arrêt, c’est la jungle » ! Donc, après un passage dans ce milieu, il est notoirement admis que les individus sont de moins en moins aptes à s’insérer dans la société. Par ailleurs se pose le problème de la réparation du préjudice à la victime. Le fait de sanctionner le coupable suffit-il à réparer le mal commis ?

D’autre part, cette institution fonctionne comme une micro société où ceux qui disposent de suffisamment d’argent s’en tirent le mieux ! Les détenus sont souvent exploités par les entreprises privées qui les font travailler pour des salaires dérisoires.

Certains disent pourtant : « heureusement que j’ai été arrêté » exprimant ainsi le besoin d’un milieu fermé les protégeant d’eux-mêmes et leur fixant des limites. La prison peut aussi aider à une certaine prise de conscience de la gravité des méfaits commis mais celle-ci peut intervenir parfois très tardivement. Lorsqu’elle survient il serait peut-être opportun de revoir et modifier la peine afin de redonner sa chance au détenu, un acharnement risquant au contraire d’entraîner un découragement et une amertume légitimes.

Nous nous sommes demandé pourquoi certaines personnes commettaient des actes les conduisant irrémédiablement en prison. L’inadaptation sociale est-elle innée ou au contraire générée par la société elle-même ? Certains pensent qu’on est violent par nature, d’autres au contraire défendent l’idée que le vécu personnel et social (enfance notamment) conduit à la violence, l’illégalité de principe, l’émergence de mondes parallèles où les règles de vie sont en opposition systématique à la Loi de la République. On peut s’interroger sur les manques de la société au niveau de l’éducation, la délinquance en col blanc rarement sanctionnée et donnant un exemple déplorable aux jeunes.

La société est elle-même intrinsèquement violente : déshumanisation des grandes villes, culte de l’argent roi, paupérisation galopante, ghettos, chômage…etc, et l’on peut se demander si ce n’est pas de cette violence que le détenu cherche à se protéger en vivant dans un monde marginal quitte à se faire enfermer.

Nous avons réfléchi à un certain nombre de solutions alternatives. Au lieu de mettre à la poubelle les délinquants incapables de s’adapter, la société ferait mieux de donner des moyens de réinsertion, d’adapter la justice en la rendant moins rigide et plus humaine et de prévenir par un dispositif éducatif plus efficace (pourquoi ne pas enseigner la non-violence et la résolution de conflits à l’école ?). Les élites de la nation doivent donner l’exemple en ayant un comportement irréprochable. Il existe des peines autres que l’enfermement : les travaux d’intérêt général (TIG) par exemple, mériteraient d’être développés. Il y aurait d’autres peines de substitution à imaginer mais pour cela il faut du courage politique et de l’investissement financier. Chacun peut aussi autour de lui tenter de créer du lien social, une société plus humaine, et combattre ainsi l’égoïsme grandissant.

Thèmes proposés pour le Café Citoyen du Jeudi 13/06/02 :

- Faut-il légaliser l’euthanasie ?
- A quoi sert l’armée ?
- Forces et limites du bénévolat ?
- Le bonheur est-il une finalité ? Thème retenu
- Comment définir l’être humain ?