Qu'est-ce que la Culture Populaire ?

Pascal Bruno souhaite la bienvenue à tous les participants et remercie Anne-Marie Luciani, Adjointe à la Culture de la ville d'Ajaccio d'avoir répondu à son invitation.

Le but du café citoyen, est-il rappelé, est de faire remonter des propositions aux élus et de faire redescendre les propositions venant des élus afin d'en débattre et , le cas échéant,de les relayer si elles sont jugées recouper  les attentes des ajacciennes  et des ajacciens.

Pascal accompagné  de membres du café citoyens a  déjà eu des rencontres avec le maire et certains de ses adjoints.

Anne- Marie Luciani se déclare favorable à la démarche et indique qu'elle est à l'écoute des propositions. Elle évoque la lettre de l'Office Municipal du Tourisme qui est bien faite mais trop peu connue.

Afin de tester la connaissance de la programmation culturelle, elle demande qui est au courant de ce qui est proposé en ce moment à l'espace Diamant..... bien peu répondent par l'affirmative.

Plusieurs thèmes sont proposés au vote des participants :
1° Le sport en Corse
2° L'utilisation des transports en commun
3°  La culture dans l'espace insulaire
4° Un comportement citoyen, pour quoi faire?
5° Le devenir de la jeunesse corse
6° Langues régionales, unité ou séparatisme
7° La mixité: fille – garçon à l'école  ( séparation des  2 sexes , tendance qui vient des States »
8° A quel âge devrait on apprendre le Corse? 
7° Qu'est ce que la Culture Populaire ?
9° La Culture de la grève.

C'est le  thème «  Qu'est ce que la Culture Populaire » qui a recueilli le plus de voix et qui a donc été choisi.

Anne- Marie Luciani  a voté pour ce thème. Elle constate que l'on se demande rarement par quoi les choix culturels de la ville sont guidés. Il a souvent été considéré que les choix de la ville sont élitistes. Elle s'inscrit en faux contre cette idée car culture populaire signifie culture qui plaît et le qualificatif de populaire n'est en rien péjoratif.

La Culture peu et doit avoir une exigence de qualité et la ville n'exclut aucun genre. On est pour élever les esprits et de s'éloigner de la culture commerciale, de la culture TV.

Les débats se sont orientées autour de plusieurs axes de réflexion.

Le compte rendu reflète les différentes prises de position et idées qui ont été émises sans que chaque idée  reflète nécessairement  la position de la majorité des membres présents.
 
Le terme «  Culture populaire est-il approprié? »

Le terme «  Culture Populaire » est idéologiquement orienté car on peut se demander comment une Culture pourrait ne pas être populaire. Il faut que tous puissent y accéder. On devrait plutôt parler de Culture pour tous. Le problème essentiel c'est l'accès à la Culture. Il faudrait parler de Culture, d'Arts et de traditions populaires plutôt que de Culture Populaire. Les contes font partie des traditions culturelles. Il est à regretter que le festival  du conte qui était organisé à Vero chaque année ne soit plus assuré.

La Culture populaire doit-elle formatée et catégorisée par opposition à la Culture classique ?

Dans les banlieues on ne saurait considérer que la Culture se réduit au rap ou au hip hop. Anne – Marie Luciani indique que la municipalité a fait le pari de permettre à des jeunes des quartiers défavorisés d'accéder à la Culture classique. Ils ont assisté par exemple à une pièce de Marivaux. Il y a aussi une Culture élitiste qui demande des références et de un apprentissage mais elle n'est pas  toujours exempte d'un certain snobisme.

La frontière entre culture élitiste et culture populaire est parfois ténue. Par exemple , le Jazz demande une certaine éducation musicale mais une grande partie du public de la manifestation  « Jazz in Aiacciu »apprécie d'assister aux concerts sans posséder de connaissances particulières en musicologie. Cet engouement pour le festival de Jazz révèle qu'il y a une volonté de loisirs et de distractions en Corse hors des shoppings nocturnes.

Il ne faudrait pas pour autant considérer que beaucoup de gens aspirent spontanément à la Culture qui demande un certain effort de réflexion …. à preuve l'audience des émissions culturelles sur Arte au regard des records d'audience des journaux télévisés de Jean-Pierre Pernault et leurs informations de proximité auxquelles s'ajoute souvent une succession de faits divers sans mise en perspective. .

Culture populaire et culture commerciale

La Culture populaire doit être distinguée de la culture commerciale. Un des intervenants indique qu'il a récemment emmené ses enfants au cirque mais qu'il a été déçu par des artistes quasi pathétiques. En 2005, la Mairie de Peri avait fait venir un cirque de plein air avec des jeunes artistes. C'était extraordinaire, c'était gratuit. Ne pourrait-on pas refaire en 2010 le même genre de démarche mais à une échelle plus importante ? Les loisirs corses sont peu adaptés au mauvais temps qui laisse dépourvu et prisonnier du manque d'activités. Si halloween était à l'origine une manifestation culturelle, c'est devenu  une manifestation commerciale. Dans les sociétés de consommation, la culture non commerciale peut-être considérée comme une gêne. Aux Etats-Unis, certains voudraient réduire la culture aux Mac – Do. Nous n'avons plus la capacité de résister à la propagande commerciale. La Culture au sens noble du terme peut être un instrument de résistance citoyenne.

Modes de transmission de la culture populaire et de la culture en général

Le vecteur traditionnel de transmission de la Culture Populaire était les proverbes. Or on cite de moins en moins de proverbes. La Culture populaire, c'est la transmission. Le rôle des parents est essentiel dans la transmission de la culture. Il est certes plus facile de mettre les enfants devant une console de jeu ou devant Face Book. Il vaudrait mieux des bibliothèques que des vidéothèques qui tendent à les remplacer.

Les jeunes ne lisent plus

Ils sont rarissimes ceux qui empruntent des livres qui sont pourtant gracieusement mis à disposition au Bistrot du cours. Avant les parents incitaient les enfants à lire. Mais , fait remarquer quelqu'un , des jeunes peuvent à la fois s'intéresser aux consoles de jeu, à internet.... et à la lecture. La manifestation culturelle «  lire à la plage » est  d'autant plus à saluer qu'elle se situe dans un contexte général de désaffection pour la lecture. 

La Culture, c'est aussi de pouvoir s' adapter  aux évolutions de la société et des technologies  et donc aux autres. Cette adaptation permet de mieux communiquer avec les jeunes en raison d'une meilleure connaissance de leur  langage. C'est ainsi que des gens de plus de 70 ans se mettent à Internet. Internet doit rester un outil alors qu'il devient souvent un objet transitionnel ou un objet de désir créant des addictions.

La Culture populaire comme un vecteur et une expression du vivre ensemble

Le Carnaval qui n'a plus lieu depuis quelques années à Ajaccio signait un vivre ensemble. Les parents suivaient leurs enfants. Pour Anne-Marie Luciani, le carnaval, c'est l'exemple type d'une culture populaire. C'est la Culture qui va dans la rue. Elle évoque le souvenir de son arrivée à Ajaccio en 1984 un jour de Carnaval. Le Carnaval demande une lourde préparation. Il y en a un à Sartène qui est d'origine associative mais qui est relayé par la ville. A Ajaccio, la question s'est souvent posée. Son organisation  demande de l'énergie et il représente un coût financier important. Il faut par exemple des espaces d'accueil pour les chars. L'association qui le portait à Ajaccio s'est essoufflée. Un Carnaval pourrait être organisé sous la forme d'une régie municipale. Le Carnaval est une idée à relancer. Un des participants évoque le carnaval de Granville dans la Manche qui existe depuis 120 ans  ainsi que le festival de la soupe à Florac. Ce sont des manifestations  d'une  réelle culture populaire;

La Fête d'halloween était célébrée il y a quelque années à Ajaccio. On dit souvent qu'il s'agit d'une fête américaine alors qu'il s'agit à l'origine d'une fête Celte. Elle a été critiquée notamment parce qu'elle serait en opposition avec la fête de la Toussaint  tendant à s'y substituer  alors que les catholiques sincères savent parfaitement faire la différence. C'est une fête qui plaisait. Il ne faut pas rejeter ce qui n'est pas d'ici du moment que le public adhère. C'est bien de mettre en valeur sa région mais il ne faut pas penser qu'à sa région. Les bals populaires qui étaient organisés dans les quartiers sont aussi une expression traditionnelle et populaire du vivre ensemble.

Il conviendrait aussi que les manifestations culturelles soient un moyen de dialogue avec diverses communautés ( maghrébine, portugaise) qui font partie de l'Ajaccio d'aujourd'hui. Les manifestations de  la Culture populaire  doivent-elles refléter la ville ou la région dans lesquelles elles ont lieu ? Le marché de Noël  d'Ajaccio ne relève pas d'une tradition locale comme c'est le cas en Alsace. Il  Serait plus adapté dans les  villages alentours. L'an passé il y a eu la San Andria. On doit s'ouvrir à la Culture d'autres régions et d'autres pays sans oublier la culture de sa région dont on doit faire profiter les autres. Il n'est  pas sûr que le carnaval fasse partie intégrante de la Culture Corse. Aux Antilles, le Carnaval est  quasiment ancré dans les gênes culturels. Tout le monde descend dans la rue et c'est la population qui l' organise directement.

La Culture  doit s'ouvrir aux autres et ne pas être instrumentalisée au service de politiques identitaires ou communautaristes, le danger étant grand dans un contexte de crise économique de considérer avec crainte ceux qui sont différents de soi.    

Le coût de la Culture ne risque-t-il pas d'être un obstacle à son caractère populaire ?

Il y  30 salariés à l'espace Diamant. Cela ne va t-il pas entraîner un coût excessif pour les spectacles? Les séances de cinéma sont très chères ( 10 € par personne) et il n'y a pas toujours de réduction pour les enfants. On sait qu'en matière culturelle,  l'argent et les subventions   viendront de moins en moins des collectivités locales. Il faudrait peut-être explorer la piste du sponsoring. Il est possible d'aller chercher ailleurs que dans les seuls fonds publics. L'adjointe à la Culture précise que l'espace Diamant est un des théâtres les moins chers de France. Il y a une politique d'abonnement qui ramène le prix des spectacles à un peu plus de 10 €. Trois médiathèques gratuites sont à la disposition de la population sur Ajaccio. Le Budget de la Culture  de la ville d'Ajaccio uniquement en terme de programmation est de 460 000 € par an. En règle générale, un budget de cette nature représente 11% du budget global  de la ville. A  Ajaccio on est à 6,7%. L'énorme retard qui était à rattraper est en train de l'être. L'un des vecteurs de la politique culturelle, c'est la lecture publique. Il y avait à Ajaccio une réelle culture de spectacle et de théâtre. Il y a eu un manque de volonté politique depuis de nombreuses années.

Comment assurer l'accès à la culture?

Quand on parle d'accès à la Culture, on pense souvent grosses structures mais on a tout faux. Rappelons-nous les maisons de la Culture crées  par André Malraux. C'était la Culture à proximité. Mieux que des médiathèques, il serait plus judicieux de créer des « lieux citoyens de proximité » dans les quartiers. Une participante indique que les médiathèques permettent aussi des rencontres entre les gens. Des cafés citoyens pourraient être organisés dans les locaux des médiathèques. La fermeture de la Bibliothèque municipale Rue Fesch le samedi montre qu'il y a encore beaucoup d'efforts à faire en matière d'accès aux lieux de Culture.     

Culture et jeunesse

Pour les jeunes, il y a  une programmation spécifique et ambitieuse. Il  y a eu 9 spectacles depuis le début de l'année avec de articles de presse en amont. Une intervenante cite l'établissement scolaire où elle travaille et où la  Culture est l'axe principal du projet d'établissement. L'ambition , entre autres , est de réintroduire la Culture du Livre, ce qui passe par la découverte des grands auteurs et des pièces de théâtre. Quand on pense, on réfléchit, donc on est libre. Il y a une crise culturelle indéniable dans le monde occidental. Sur internet , il y a une vidéo de l'intervention de celui qui représente les jeunes UMP et qui dans un discours cite à la fois Laval et Guy Môquet. Beaucoup de projets culturels n'ont pas abouti.  Les  municipalités essaient de combler les lacunes en éducation artistique. Il est à regretter que peu d'enseignants assistent aux spectacles avec leurs classes. Les programmes scolaires sont lourds, ce qui laisse peu de place pour de activités artistiques ou culturelles. De plus, elles nécessitent un budget. Avant les centres aérés étaient encadrés par des membres de la Jeunesse et des Sports. C'est la Collectivité Territoriale de Corse qui a repris ces attributions mais on peut s'interroger sur son action effective.

Un citoyen présent regrette que la rentrée des classes ait eu lieu  cette année le 9 septembre, jour de la Libération d'Ajaccio et  du début de la Libération de la Corse alors qu'il s'agit d'un acte citoyen majeur qui devrait être honoré comme tel. Les programmes scolaires ont souvent passé sous silence qu'Ajaccio a été la première ville française à être , à s'être libérée.

Culture instrument de Liberté citoyenne:

 La Culture se situe dans la lutte des classes. Que deviennent les enfants qui n'ont pas des parents qui leur transmettent un bagage et des valeurs  culturelles ? Une régression culturelle est peu à peu à l'oeuvre. Le socle commun de connaissances au collège a réduit considérablement les exigences en matière de Culture Générale. Le Ministre de l'Education nationale Luc Chatel a dit qu'il faudrait lutter contre l'illettrisme au collège. C'est reconnaître «  ipso facto » que l'école primaire ne permet pas à tous de lire et d'écrire. Comment peut-on essayer de redonner confiance dans l'Avenir ? La Culture générale est peu à peu supprimée des concours administratifs. Or n'en déplaise à certains dirigeants, la connaissance de la  Princesse de Clèves même si elle n'a ps d'utilité opérationnelle directe participe de la Culture Générale qui permet de construire un esprit critique et citoyen. Pour que les gens ne pensent plus, on crée des évènements comme la mobilisation excessive face à la grippe H1N1. Cela accapare leur attention et leur évite de réfléchir, d'aller vers l'autre. Il existe un triptyque pour empêcher les citoyens de jouer un rôle effectif.
–        Entretenir une peur permanente
–        Casser la séparation des pouvoirs
–        Casser les solidarités   
Les réformes successives sont en train de détricoter, au nom d'une idéologie libérale,  le programme du Conseil National de la Résistance qui s'appelait «  les jours heureux ».

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Une réflexion s'est engagée sur le rôle du café citoyen comme vecteur de la participation de la population à la vie publique. La bonne volonté de organisateurs se heurte souvent à l'inertie et à l'apathie. Il existe d'autres formes de communication et de participation comme les forums sur internet qui concurrence les cafés citoyens. Mais il est objecté que le net ne permet souvent pas une réelle communication avec des échanges réels mis aboutit à une juxtaposition de points de vue et d'opinions.

Pascal réaffirme sa volonté de continuer avec l'aide de tous la démarche du CAFE CITOYEN  et , après avoir remercié tous les présents leur donne rendez- vous le mardi 30 novembre.