Compte-rendu synthétique par Marc Houssaye — Café Citoyen de Caen (23/06/2001)
Animateur du débat : Marc Houssaye
» Politique et Société
L'assistanat est-il un progrès ou une nécessité sociale ?
La notion d’assistanat porte en elle deux acceptions. La première suppose réciprocité ; l’assistant est alors une personne qui en seconde une autre. La deuxième suppose une relation unilatérale. De l’aide est apportée à quelqu’un dans le besoin. C’est une noble action, révélant la solidarité entre les hommes. Pour autant, ce mot « assistanat » est peu à peu devenu péjoratif. Et dans la bouche de certains, il évoque quelquefois la fainéantise. Un assisté serait en proie à l’oisiveté. On le suspecterait de profiter de la société.
D’énormes structures dites « sociales » se sont développées depuis quelques dizaines d’années en France. Et l'État s’est considérablement attaché à déployer une politique sociale mettant en place des systèmes de subventions, d’aides, le tout enveloppé de procédures administratives. D’aucuns y voient une société plongée dans l’inertie qui invite ses membres à se dégager de leurs responsabilités. Certains « profiteraient du R.M.I. » alors que d’autres « ne demanderaient qu’à travailler ». Mais pour ne pas se laisser aller à des raccourcis peu éclairants il nous faut décortiquer la notion d’assistanat.
L’assistanat veut rétablir l’égalité entre les citoyens. D’abord, est-il question de l’égalité des fins ou de l’égalité des moyens ? L’égalité des moyens consiste à faire en sorte que chacun bénéficie des « mêmes outils » pour arriver à son propre but. Par exemple, « les hommes naissent libres et égaux en droits ». L’égalité des fins aboutit à une équivalence entre les individus. Si l’égalité des moyens est inscrite dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, l’égalité des fins reste utopique sinon redoutable. Car elle peut conduire à l’égalitarisme et dériver sur des idéologies normalisatrices et de standardisation. Toujours est-il qu’instaurer l’égalité des moyens ne suffit pas forcément à établir une réelle égalité entre les individus. Il faut, il est vrai, et nous en avons déjà parlé lors de nos rendez-vous, un véritable ciment entre les citoyens. On parle d’entraide, d’altruisme, de fraternité. A cette recherche de l’égalité, notre société a visiblement répondu par la valorisation du travail et du mérite.
Mais la méritocratie développe l’individualisme et suscite l’envie personnelle de réussite. Le travail, quant à lui, subit les assauts du chômage. Notre société se trouve dans l’incapacité de fournir à l’ensemble de ses membres un travail, c’est-à-dire, en quelques sortes, une place dans la société. Pour un citoyen, « l’assistanat, institutionnalisé par des associations caritatives, certes essentielles, ne développe pas le sentiment de solidarité. » « Au contraire, il contribuerait à déresponsabiliser ceux qui ne s’investissent pas dans ces associations ».
Quelqu’un pose la question : « N’est-ce pas révoltant d’arriver au point d’assister des gens jusque dans leurs besoins fondamentaux ? N’est-ce pas humiliant ? Ne devrait-il pas exister un R.M.U., un revenu minimum universel, qui garantirait ces besoins essentiels ? ». Le travail pourrait alors être seulement un moyen « d’améliorer ses conditions de vie ». « L’instauration d’une telle mesure remettrait grandement en cause notre rapport au travail ». « Car l’on s’apercevrait que les rouages de notre société de consommation sont nos propres fers et que nous participons tous à leur bon fonctionnement », rétorque-t-on dans la salle.
A la question « est-ce une nécessité sociale que d’assister les gens ? », l’assemblée citoyenne répond oui. Les Restos du Cœur, et bien d’autres autres organisations, ont montré combien il était urgent de subvenir aux besoins de certains de nos concitoyens. Néanmoins n’est-il déplorable que nous soyons dans l’obligation de ne réagir qu’à ce stade de détresse humaine. L’assistanat n’est qu’un palliatif certainement nécessaire. Mais il faut réfléchir à long terme pour espérer voir apparaître une nouvelle société.
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