Compte-rendu synthétique par Marc Houssaye — Café Citoyen de Caen (22/01/2000)
Animateur du débat : Marc Houssaye
» Politique et Société
Une société sans prison ?
Une société se doit de satisfaire les besoins des individus, en l'occurrence celui de la sécurité. Par ailleurs, la justice assure le respect des droits de chaque individu social. Or, nous sommes habitués à assimiler la sanction à la justice ; car cette dernière semble seulement se révéler au moment de l'infraction des lois. Au delà des récentes révélations sur l'état et le climat de l'univers carcéral, nous pouvons nous interroger sur la réelle utilité sociale de la prison. Pouvons-nous enfin concevoir une société sans prison ?
L'emprisonnement est une sanction prise par la justice lorsqu'un individu enfreint une loi ou transgresse les libertés et les droits d'autrui. Pour beaucoup, la justice constitue la protection de l'"honnête citoyen" contre la malveillance de certains. Il apparaît alors normal de préserver la sécurité d'un groupe au dépens de la liberté d'une personne potentiellement dangereuse. Mais des citoyens considère cette privation de liberté comme une aberration. En effet, il n'existe pas de hiérarchisation des droits. Ils doivent tous être respectés. Aucun droit n'est plus important qu'un autre. Toutefois, la prison possède un intérêt pratique ; Il est plus facile de surveiller quelqu'un entre quatre murs qu'en liberté.
On estime souvent cette perte de la liberté comme le prix à payer pour racheter sa faute. L'incarcération permettrait donc de se sentir libéré parce que repenti. Malheureusement, on constate que l'on ne ressort pas de la prison meilleur que lorsque l'on y est rentré. Et nous ne serions pas confronté au malaise de la réinsertion si la prison favorisait la resocialisation. De plus, le milieu carcéral est un microcosme particulier, quelquefois, comme le soulignent des intervenants, avec ses lois propres et un fonctionnement interne obscur. Aussi nous est-il difficile de l'intégrer à la société dans laquelle nous vivons. Etrange voire suspect, nous le rejetons facilement. Et l'on se méfie souvent d'un ancien détenu. Cette discrimination ne favorise donc pas la réinsertion au sein de la société. La prison ne devrait pas être une voie sans issue. Et pour établir des ponts entre le milieu pénitencier et la société des S.M.P.R. (Services médico-psychologiques régionaux) ont été mis en place. Les T.I.G (Travaux d'intérêt général) permettent aux délinquants d'avoir des activités éducatives et épanouissantes. En effet, parallèlement au travail effectué, ils font du sport et surtout vont à l'école - ce qui pour la plupart des délinquants est une chance d'insertion sociale.
Nous devons néanmoins nous préoccuper de l'origine de ces maux. Pourquoi cette personne a-t-elle violé ? Pourquoi celle-ci a-t-elle volé ? Pourquoi existe-t-il autant de délinquance ? Certainement parce que des besoins ne sont pas satisfaits.
Si une société se doit de faire respecter des lois de vie en communauté, elle doit aussi satisfaire les besoins des individus et œuvrer à leur épanouissement. La prison a donc un rôle d'oubli pour la société. Nous avions les oubliettes au Moyen Age, plus tard les bagnes, aujourd'hui les prisons. Des citoyens mettent en exergue la contradiction qui consiste à enfermer des individus avec lesquels nous devrions au contraire être plus attentionnés.
Ainsi, ne devrions-nous pas remettre en cause notre société qui, basée sur un système compétitif, dans lequel le plus fort opprime le plus faible, oublie que les individus sont tous différents. Notre société impose des normes par exemple les critères de beauté. De plus, il faut considérer que tous les individus peuvent apporter quelque chose à la société. Combien de personne se sentent exclues et inutiles ?
Quelles solutions proposerions-nous? Puisque la prison apparaît comme une voie sans issue, nous devons alors nous intéresser aux processus en amont de cette condamnation. Tout d'abord, une société doit satisfaire les besoins des individus. De plus, nous pouvons dégager des composantes sociales opprimantes. C'est le cas des règles de compétitivité - notamment commerciale - qui régissent notre environnement et qui font régner la loi du plus fort. En outre, notre société fabriquent des normes qui contribuent à l'exclusion de chacun d'entre-nous. Une réorganisation sociale est donc inéluctable si l'on désire résoudre le problème de l'univers carcéral et espérer voir naître une société dépourvue de prison.
En Bref, la réflexion citoyenne s'exprime :
La prison supprime la liberté d'un individu afin de préserver les droits et les libertés des autres. Elle devrait donc posséder un rôle de réintégration sociale. Cependant, nous constatons que l'univers carcéral ne favorise pas la réinsertion. Ces individus écartés temporairement de la société sont souvent jugés foncièrement asociaux voire mauvais.
Il faut se préoccuper de l'origine des injustices et essayer de faire le lien entre les règles de notre société et le niveau de délinquance. En effet, une société qui ne satisfait pas les besoins des individus sera confronté à une forte délinquance. De plus, un système compétitif - que notre modèle économique impose - fait régner la loi du plus fort. Enfin les normes sociales amènent à nous exclure les uns des autres. Penser une société sans prison implique donc une réflexion plus profonde et plus globale sur l'organisation même de notre société.
Thèmes proposés pour le Café Citoyen du 2 février 2000 :
- Trop de lois rend-il irresponsable ? 4 voix
- Internet et citoyenneté. 5 voix
- Les conditions de détention dans les prisons. 5 voix
- Les citoyens peuvent-ils faire quelque chose au sujet des prisons ? 1 voix
- La démocratie doit-elle permettre l'arrivée au pouvoir de partis non-démocratiques ? 10 voix
Interventions
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