Compte-rendu synthétique par Catherine Créhange — Café Citoyen de Metz (19/12/2009)
Animateur du débat : Laurent Watrin
» Démocratie et Citoyenneté
La démocratie a-t-elle trouvé ses limites ?
Café citoyen de Metz, le samedi 19 décembre 2009
Débat animé par Danièle Noël.
Spontanément, la question s'est trouvée liée à l'élection du chef de l'Etat. Un participant souligne que la démocratie n'existe pas partout, un autre que la définition en est occidentale, un autre encore qu'elle est l'expression de la voix du peuple. Une autre parole fait remarquer que la démocratie participe de l'envie de partager des choses. Ce qui la caractérise, c'est le vote. Le vote suisse anti-minaret, qui a eu lieu la semaine précédente, et qui pose des questions en terme de démocratie, reflète des crispations identitaires. Le référendum d'initiative populaire, comme il existe en Suisse, n'est pas strictement synonyme de démocratie. En France, le vote n'a pas toujours été le reflet de la voix du peuple en France : au XIX° siècle, il est censitaire, lié à la richesse des électeurs. La démocratie est le pouvoir donné au peuple. Les Grecs anciens, l'Islande ancienne sont des démocraties.
Un autre intervenant fait remarquer que le vote n'est pas le seul critère de la démocratie. Beaucoup de pays où l'on vote ne sont pas des démocraties. Il faut aussi que les trois pouvoirs (législatif, exécutif, judiciaire) soient séparés. Or, dans nos pays, ils le sont de moins en moins. Par exemple, des ministres candidats à une élection sortent du cadre. Lorsque le Président de la République joue le rôle de premier Ministre, il sort également de son rôle; de même lorsque le vote et donc le rôle des députés sont vidés de leur substance. La presse également peine à exercer son rôle de "quatrième pouvoir". En Europe, le champ de la démocratie recouvre des espaces différents : les droits ne sont pas les mêmes pour tous, recouvrant de grandes divergences sociales. La manipulation de l'opinion est "colossale", selon ce participant.
Pour un autre intervenant, l'exercice de la démocratie, c'est plutôt le processus de décision qui qualifie. Ainsi, en France aujourd'hui, le Président gère toute la vie politique et le dit. Le premier Ministre ne fait qu'administrer. Le système est semi-présidentiel, autrement dit semi-parlementaire : il provient directement du référendum de 1965. La Vè République pourrait d'ailleurs laisser dans sa forme la tyrannie s'installer. Les institutions ne sont pas en cause, c'est le mode de gouvernance actuel qui l'est. La concentration extrême des pouvoirs pose question sur la nature de notre démocratie. L'abstention, de plus en plus forte dans nos pays, pose également le problème de ce que projette ou plutôt ne projette plus la démocratie, ainsi que de la représentativité des élus. L'opinion est manipulée par les médias et les politiques ; les sondages d'opinion en sont l'une des manifestations les plus visibles.
Un autre intervenant note qu'il faut faire le tri dans le travail de la presse. Il faut éduquer à la citoyenneté et à la démocratie, apprendre à chacun les droits et les devoirs que cela implique. Il existe une corrélation entre la culture des jeunes qui s'effondre et la pratique de la démocratie. Un participant insiste sur le fait que, selon lui, Nicolas Sarkozy a été élu par des "slogans de sondagiers" et de la communication, et assez peu sur un contenu. Or, on vote pour des personnes à qui on délègue aussitôt tous les pouvoirs. La France est un Etat-nation, et cette position particulière, continue depuis le Moyen-Age, est unique.
La démocratie en France s'est forgée à la Révolution à partir des apports du Siècle des Lumières, de principes de la démocratie anglaise sur la séparation des pouvoirs, et sur l'égalité hommes/femmes. Les découpages en 1958 avaient un but politique. Mais la démocratie anglaise a ses limites; on peut ainsi être majoritaire avec 10% des votants. La complexité de la pensée et de notre société trouble aussi le message. Paradoxalement, dans le même temps, se développe notre vision religieuse du bien et du mal, manichéen.
Un participant insiste sur le fait que la ratification du traité de Lisbonne s'est fait par la voie parlementaire oou par la voie élective, et que dans le second cas les réticences, des Irlandais en particulier, se sont réglées d'une manière tenant plus du "politiquement correct" que de la démocratie.
Un participant ajoute que la démocratie existe aussi en un autre lieu de pouvoir, l'entreprise, par le biais des syndicats.
(compte-rendu écrit par Catherine Créhange)
Interventions
Miha
dimanche 06 décembre 2009 19:59:56 +00:00
Pour savoir si la démocratie a trouvé ses limites, encore faudrait-il qu'elle ait été mise en place.
C'est une utopie qui n'a pas été (encore ?) réalisée.
Dans notre pays, par exemple, et dans d'autres, elle se limite au seul droit de vote, ou à peu près.
C'est largement insuffisant pour que le pouvoir soit au peuple.
Après son élection, un élu confisque son pouvoir au peuple et dit "j'ai été élu, vous n'avez rien à dire ; je sais mieux que vous ce qui est bien pour vous."
Quand on constate, en plus, que les élections ne sont que des campagnes publicitaires où ceux qui ont le bon slogan l'emportent, on peut légitimement penser que le droit de vote n'est que l'illusion d'avoir son mot à dire.
Pour que le droit de vote soit vraiment une façon d'exercer leur pouvoir, il faudrait que les citoyens soient informés (et pas désinformés), qu'on leur donne une vraie conscience politique (et pas les abrutir à longueur de temps avec des sujets "caches-vrais problèmes"), etc...
Ensuite, il faudrait que les élus aient réellement des comptes à rendre pendant leurs mandats ; ce qui n'est pas le cas.
Alors : à quand la démocratie pour savoir si elle risque de trouver ses limites ?
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