Compte-rendu synthétique par Élisabeth Rodot — Café Citoyen de Argentan (29/11/2001)
Animateur du débat : Élisabeth Rodot
» Politique et Société
Comment réussir l'intégration ?
Depuis quelques mois on constate un certain nombre d'incidents révélateurs d'un malaise grandissant dans la population immigrée. (Match de football France - Algérie par exemple). Nous avons essayé de comprendre ce phénomène.
Pour nous le mot intégration s'oppose à la notion de ghetto chère aux anglais. En France on cherche à mixer les populations tout en respectant les individualités. Un citoyen prend l'exemple de l'huile et du vinaigre qui, mélangés, forment une émulsion homogène tout en gardant les spécificités de chaque corps. On peut aussi définir le terme par son contraire : le rejet, l'exclusion. Tout citoyen doit faire l'effort de s'intégrer quand il arrive dans un nouveau lieu, une nouvelle profession… La notion fait appel aussi au concept de droits et de devoirs : « s'intégrer c'est arriver à jouer le jeu » affirme un participant.
Malheureusement s'il on fait le bilan de ces dernières années, force est de constater que l'intégration est loin d'être réussie pour tout le monde. Un certain nombre de jeunes ne respectent pas les règles du droit français et s'inscrivent plutôt dans un climat de violence. Tous les symboles représentatifs de l'autorité de l'État et des Pouvoirs Publics ont tendance à être bafoués : attaques de bus, voitures brûlées, commissariats menacés, hymne national sifflé, etc.
D'autre part on constate que la population immigrée occupe une place majoritaire dans les prisons. Nous n'avons pas le même langage ni les mêmes valeurs qu'eux, ce qui radicalise des situations de blocage et d'incompréhensions mutuelles.
Très souvent les rappels à la Loi sont considérés comme des actes racistes. D'un autre côté certains français ne font aucun effort pour permettre une bonne intégration : discrimination à l'emploi, délit de faciès, etc., phénomènes qui tendent à se renforcer depuis les attentats du 11 septembre.
Face à ce constat plutôt négatif nous avons essayé de sérier les causes de ce phénomène. Il y a d'abord des causes liées à l'histoire de notre pays, à savoir la guerre d'Algérie et la politique coloniale de la France en Afrique. Cela explique peut-être un certain esprit de revanche. Historiquement la France, pour des besoins économiques, a fait appel à une époque à la main d'œuvre étrangère et notamment nord-africaine. Cette population installée en France de façon durable subit les contrecoups de la récession économique et leurs enfants, nés en France, ont des problèmes identitaires liés à tout ce contexte historico-économique. Suite à cet apport massif de main d'œuvre, des zones péri-urbaines importantes ont été construites créant une véritable ghéttoïsation, source d'exclusion. Il y a aussi un phénomène de saturation, appelé seuil de tolérance, qui fait qu'au delà d'un certain nombre la population ne peut plus s'intégrer.
Certains citoyens avancent également le heurt de civilisations et de religions différentes qui contribuent à la radicalisation des positions. Quelqu'un regrette que les musulmans n'aient pas de lieu de culte approprié et comprend qu'ils puissent ressentir un sentiment de frustration. Une personne reproche à la société occidentale d'imposer au tiers-monde un modèle de pensée et de comportement qui peut provoquer un sentiment de révolte. On souffre aussi en France d'une « omerta » à ce sujet et d'un complexe de culpabilité entretenu par divers organismes de lutte contre le racisme. Cette Loi du silence fait qu'on n'ose plus parler des véritables problèmes de peur de choquer le « politiquement correct ».
Devant ce constat des solutions ont été proposées. La première chose à faire est de pouvoir parler sans fausse honte en mettant à plat l'ensemble des problèmes. Les politiques doivent cesser les discours démagogiques et assumer leur part d'autorité devant les pouvoirs publics pour permettre à ceux-ci de faire respecter les droits mais aussi d'imposer les devoirs qui incombent à chacun. Il faudrait aussi réinstaurer le dialogue entre les différents protagonistes., avoir des projets communs pourrait permettre aux gens de se parler (exemple fête inter- culturelle d'Argentan).
Une véritable reconnaissance de leur culture et de leur religion devrait, dans le respect de la laïcité, leur permettre, grâce aux moyens d'État, d'éviter les frustrations et les radicalisations. Les problèmes d'urbanisation doivent être traités énergiquement par une volonté politique de s'attaquer au sujet. Enfin un citoyen remarque que si les occidentaux combattaient la pauvreté là où elle existe, les phénomènes migratoires seraient marginalisés. Il faut revoir la politique de l'aide car actuellement les pays riches sont de véritables créateurs de pauvreté.
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