Compte-rendu synthétique par Marc Houssaye — Café Citoyen de Caen (13/10/2001)
Animateur du débat : Marc Houssaye
» Démocratie et Citoyenneté
Nos démocraties sont-elles capables de se préserver du terrorisme ?
Le terrorisme prône l’emploi systématique de la violence pour atteindre un but politique. C’est l’ensemble des actes de violence, des attentats, des prises d’otages civils qu’une organisation politique commet pour impressionner le pays, qu’il soit le sien ou un autre. Le terrorisme a ceci de terrifiant qu’il est imprévisible et touche principalement des civils. C’est en installant un climat d’insécurité qu’il déstabilise un pays.
Il ne faut pas assimiler « le terrorisme international, tel que nous l’avons vu s’exprimer le 11 septembre dernier, aux revendications, certes parfois violentes, relatives à l’indépendance, par exemple de la Corse. Tout d’abord parce que « les actes de destruction, d’explosion d’indépendantistes corses n’ont pas pour but de tuer des innocents mais essentiellement d’attirer seulement l’attention sur eux et de briser des symboles de leur rattachement avec la législation française. » Les actes terroristes du World Trade Center avaient, eux, pour but de tuer des innocents et de provoquer une onde de choc émotionnelle. Voyant les limites que se fixent ces deux types de terrorisme, nous pouvons facilement les distinguer.
« Mais comment se protéger du terrorisme ? » lance-t-on dans la salle. Notre premier réflexe est effectivement de se protéger. C’est d’ailleurs ce sur quoi misent les terroristes. Ceci a pour conséquence le repli sur soi du pays tout entier. L’action terroriste étant hors-la-loi et imprévisible, un climat d’insécurité s’installe facilement. Elle peut conduire quelquefois à la psychose collective. Quelqu’un parle alors de la tolérance non comme une vertu mais comme une « lâcheté qui favoriserait l’acceptation des actes terroristes intolérables ». Cependant, il ne faut pas confondre la tolérance de pensée – le fait d’être capable d’écouter des opinions différentes des siennes, et pourquoi pas celles d’un terroriste ? – et le domaine d’application des lois. « Et puis, souligne quelqu’un dans la salle, l’appellation de terroriste dépend du gouvernement dans lequel on se trouve. Pendant la seconde guerre mondiale, le gouvernement nazi qualifiait les résistants de terroristes. »
Notre réflexe de protection mène naturellement à la question des représailles, sinon de la défense. Certains préconisent d’étudier de plus près le financement de ces organisations terroristes pour l’enrayer. D’autres pensent que l’engagement militaire est une réponse efficace parce que de même nature que l’acte terroriste. Mais cette position est discutable. Surtout venant de la part d’États se réclamant de l’idéal démocratique.
Car tenter de résoudre de cette façon le terrorisme peut éluder la réflexion sur son origine. Quelqu’un dans la salle déclare que le terrorisme pose la question de la politique mondiale menée par les pays dits « développés ». Si quelques groupes, aujourd’hui les Taliban, ont recours à la violence pour revendiquer leur place dans le monde, c’est peut-être parce qu’ils n’ont pas eu d’autres moyens de le faire. Le fonctionnement international actuel ne propose peut-être pas à tous les pays le même accès à l’expression démocratique.
Si le recours à la force n’a pas été unanimement blâmé au cours du débat – d’aucuns voyaient dans la réplique militaire étatsunienne un avertissement et une façon de ne pas sombrer dans la terreur - , il a par contre été critiqué par quelques citoyens trouvant que cette réponse ne pouvait qu’envenimer la situation. Il n’était bien sûr pas question lors de cette rencontre de justifier ces actes inhumains mais d’en comprendre les origines.
La meilleure arme contre la tentation terroriste serait « l’éducation et le développement de la citoyenneté », note quelqu’un dans la salle. Certes. Mais quelle attitude adopter aujourd’hui face à des personnes qui n’ont pas reçu cette éducation citoyenne et qui, nourries par un sentiment d’injustice, arrivent à ce stade d’inhumanité ?
Posons-nous en démocrates. Si nous voulons défendre la démocratie – et non nos propres intérêts personnels d’habitants de pays dits développés – gardons à l’esprit les valeurs qui ont construit notre monde de liberté et de tolérance. Il ne convient pas de diaboliser les terroristes. Ces hommes sont nos semblables. Qui plus est, ils font partie du même système que nous. Préoccupons-nous de leurs problèmes pour qu’ils deviennent aussi les nôtres. Enfin, considérons que le terrorisme naît d’une détresse. Et que celle-ci est comme un « aiguillon » qu’il ne faut pas fuir ni éluder ni même dissimuler par nos propres peurs. En somme, « la plus grande erreur serait certainement d’exclure ces terroristes de l’espace d’expression publique ». Nous y perdrions nos valeurs.
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