Compte-rendu synthétique par Marc Houssaye — Café Citoyen de Caen (02/02/2000)
Animateur du débat : Marc Houssaye
» Démocratie et Citoyenneté
La démocratie doit-elle permettre l'arrivée au pouvoir de partis non-démocratiques?
La notion de démocratie semble souffrir de l'émergence de partis extrémistes qui, par l'affichage de valeurs antisémites - que l'on espérait depuis longtemps disparues - , choquent et insupportent. Cependant, ce malaise ne proviendrait-il pas de la méconnaissance des principes démocratiques ?
La démocratie est une doctrine politique d'après laquelle la souveraineté doit appartenir à l'ensemble des citoyens. C'est donc lorsque le peuple souverain élit ses représentants que se révèle totalement la démocratie. Un démocrate serait alors, par définition, celui qui accepterait d'être remis en cause, celui qui, dans son rôle de mandataire, ne s'opposerait pas aux changements voulus par les citoyens. Il en résulte ainsi la définition d'un non-démocrate : celui qui ne se soumet pas à la volonté générale.
La distinction entre des gouvernements démocratique et non-démocratique ne peut s'établir que sur le niveau d'écoute et de prise en compte des aspirations populaires; nous ne pouvons pas qualifier un parti de non-démocratique puisqu'il est encore soumis à la décision du peuple.
L'essence de la démocratie n'est pas d'interdire. En effet, interdire l'accès au pouvoir à un parti politique va à l'encontre de l'esprit démocratique. Tout d'abord parce que les contre-pouvoirs sont nécessaires. Nous connaissons tous les effets pervers du pouvoir à trop longtemps le côtoyer. Ainsi, les citoyens doivent toujours avoir la possibilité de contester une autorité. Ensuite parce que de l'interdiction formelle à la censure il n'y a qu'un pas. Et nous risquerions de sombrer facilement dans une "dictature démocratique", antilogie plus dictatoriale que démocratique par ailleurs.
Certaines interventions s'affilieraient commodément à la formule de Marat : "Pas de liberté pour les ennemis de la liberté". Pourtant, ne pas écouter, rejeter, voire bannir des individus qui prônent des valeurs autres que celles que l'on assimile souvent à la démocratie, en l'occurrence le racisme, n'élude pas la question de l'idée même du racisme. Et s'il faut combattre une chose, c'est l'idée. La première étape consiste donc à ne pas se fermer devant un raciste - ce qui renforcerait certainement ses opinions - et à l'écouter, discuter et pourquoi pas le convaincre d'aller vers votre conception des choses.
L'idée d'une coercition a été émise. Pour certains, il suffirait d'empêcher par la loi certains individus de s'exprimer pour résoudre le problème du racisme. Mais quels critères adopterions-nous pour proscrire un parti ? Les idées de racisme et d'intolérance véhiculeraient d'autant plus facilement sous la pression de cette loi.
L'éducation de tous devrait être suffisante pour rendre ces discours inoffensifs. Aussi devons-nous œuvrer, parallèlement au développement de la démocratie, au développement de l'éducation et de la tolérance et à l'épanouissement de chaque individu.
Nous ne cessons de déclamer contre des partis proclamant des idées racistes et antisémites. Cependant, nous ne nous interrogeons pas sur le manque d'idéologie des partis politiques classiques. Et il ne s'agit pas seulement de crier au scandale, de se masquer les yeux et de rejeter passionnément des hommes qui, en l'absence d'idéologie humaniste, assimile ce que l'on veut bien leur faire croire.
La démocratie doit rester le vaste champ de l'expression des opinions de tous. Les valeurs s'y confrontent. Si l'idée d'une personne ne vous convient pas, pourquoi ne tenteriez vous pas de la convaincre ?
En Bref, la réflexion citoyenne s'exprime :
La démocratie donne le pouvoir au peuple qui élit librement ses représentants. Un gouvernement non-démocratique n'accepte pas d'être remis en cause. Il nie donc la souveraineté du peuple. Un parti, quel qu'il soit, ne peut pas être qualifié de non-démocratique dans la mesure où il est encore soumis à la décision du peuple. Interdire des partis peut donc être dangereux car entraîner un totalitarisme.
Le manque d'idéologie humaniste est évident. Et s'il est permis de combattre des idées par d'autres idées, il n'est certainement pas admissible pour un démocrate de rejeter une personne qui ne possède pas les mêmes idées que lui. Pour contrer des valeurs comme le racisme, il n'y a d'autre moyen que de supprimer l'ignorance en développant l'éducation, la fraternité et la tolérance.
Notes :
- Parti politique : Association de personnes unies pour défendre des intérêts, des buts communs. Organisation dont les membres mènent une action commune à des fins politiques. (Le Nouveau Petit Robert)
Thèmes proposés pour le Café Citoyen du samedi 12 février 2000 :
- La restriction du temps de travail est-elle efficace pour résoudre le chômage ? 6 voix
- Interdire ou responsabiliser ? 5 voix
- Respect, éducation et instruction. 4 voix
- La langue française va-t-elle disparaître? Et quand ? 5 voix
- La valeur de la patrie aujourd'hui. 3 voix
- Le manque d'exemplarité des élus par rapport aux jeunes. 9 voix
- Risquons-nous d'être envahis pas des Églises pseudo-religieuses ? 15 voix
Interventions
Jacques
jeudi 27 décembre 2012 12:50:23 +00:00
L'énoncé de la question,"la démocratie doit-elle permettre l'accession au pouvoir de partis non-démocratiques", laissait penser qu'il s'agissait d'abord de nous intéresser au fonctionnement interne de chacune de ces écuries électorales...qui ne paraissait pas particulièrement démocratique, ni particulièrement favorable aux jeunes talents, ni même au talent...avec, pour point d'orgue, cette petite guerre de succession autour de l'EPAD de la DEFENSE : ici, les milieux ne valaient pas mieux que les bordures.
Si les extrêmes posaient aussi problème, c'est que les institutions publiques avaient été délibérément goupillées pour foirer le suffrage universel !?
Quant à l'anti-sémitisme proposé comme un critère structurant universel, je le trouvais plutôt névrotique...et surtout catastrophique !...!
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